La gestion du changement est certes l'un des sujets qui fut le plus traité au cours des dernières années. On y fait une fois de plus mention dans cet article du Journal Les Affaires. Le texte attira mon attention, car il aborde le sujet sous un angle différent de la très grande majorité des papiers en la matière. Cette fois-ci, on se questionne sur la façon de retirer les bénéfices tangibles du changement.
Question intéressante, voire essentielle n'est-ce pas? Pourtant, lorsque l'on traite de gestion du changement on aborde habituellement l'éternelle question de la nature humaine, qui est, en raison de sa nature, réfractaire au changement. Partant de là, il existe une panoplie de techniques afin de diminuer - éliminer ces résistances afin de pouvoir effectuer les changements et patati et patata.
Ce n'est pas que ces questions ne soient pas intéressantes, mais il n'y a rien de neuf sous le soleil de ce coté là.
Pourtant, les spécialistes en gestion du changement sont tellement obnubilés par la question des «résistances» qu'ils ont de la difficulté à aborder le changement sous un faisceau plus large.
À preuve, l'article mentionné en début de billet. Le point de départ de l'article est:
«....un sondage effectué par la firme d'experts-conseils britannique Moorhouse et le Financial Times, seulement 20 % des cadres d'entreprises disent que leurs programmes de changement se sont traduits par les bénéfices prévus.»
À ce sujet, Carole Lalonde qui enseigne à l'Université Laval mentionne que:
«...Une partie du problème réside dans la pensée magique des hauts dirigeants qui conçoivent les programmes de changement, et qui le font sans consulter les cadres intermédiaires et les employés concernés.»
Ce n'est pas faux, loin de là, mais ce n'est pas ce dont il est question ici. Le sondage ne fait pas mention de la difficulté d'effectuer un changement, mais bien, du peu de bénéfices associés aux changements effectués. Nous nous situons ici APRÈS le changement. Les gestionnaires ne mentionnent pas que le changement s'est mal opéré, qu'il y a eu de la résistance ou bien que les employés et/ou gestionnaires font de la résistance passive. Non. On mentionne simplement qu'une fois le changement fait, les gains escomptés ne se réalisent pas...
J'ai beaucoup mieux aimé la réponse de Bob Hendicott, directeur chez MooreHouse à Londres et qui mentionne que:
« les dirigeants qui conçoivent les programmes de changement oublient de mettre en place des mécanismes de gestion visant à s'assurer que ceux-ci se traduiront par des bénéfices : des avantages bien identifiés, validés par les utilisateurs et mesurés. On se concentre sur le changement, on s'assure qu'il soit déployé au coût prévu, mais on oublie sa principale raison ", a-t-il expliqué en entrevue. Selon lui, on s'y prend à l'envers. " Il faut partir des bénéfices et les traduire par des changements, et non l'inverse. »
J'ajouterais à son commentaire que le principal problème de la gestion du changement dans les organisations est un de digestion.
Oui, vous avez bien lu, de digestion.
Je m'explique.
Nous sommes devenus de plus en plus efficaces afin de donner un sens au changement, à rassembler et à diminuer les résistances. Cette connaissance, doublé d'un environnement externe et concurrentiel de plus en plus exigeant eu pour effet de multiplier les changements au sein des entreprises.
Par contre, la digestion est un très long processus qui va bien au-delà de la mise en bouche. Une fois le changement implanté, les gestionnaires doivent s'assurer que les bénéfices escomptés se réalisent, que le changement est complété, que le nouveau processus est bel et bien suivi dans toutes ses facettes, que personne ne retourne à ses vieilles habitudes et que les nouveaux objectifs/indicateurs soient au vert. Bref, il s'agit d'une longue route où rien n'est jamais gagné.
Pourtant, la réalité organisationnelle est tout autre. Les changements se multiplient à une telle vitesse qu'une fois le livrable implanté, c'est-à-dire, avalé, on passe au suivant et ainsi de suite.
Comment alors s'assurer d'une digestion complète? À peine le dernier sandwich avalé que l'on mastique un steak puis des pâtes et un autre sandwich...
Pour bien digérer, il importe de ne pas trop manger, de le faire lentement et de bien mastiquer.
Après cette boulimie de changements, comment s'étonner de ne pas en retirer tous les bénéfices?
Source de l'image: N'ayez pas peur !! La Fabrique de Blogs
Aucun commentaire:
Publier un commentaire