« Selon la Fédération des familles et amis de la personne atteinte de maladie mentale (FFAPAMM), entre 25 % et 30 % des cas d’absentéisme au travail sont attribuables à une forme connue de maladie mentale. »
Source : Journal Le Reflet du vendredi 9 octobre p. 8
De plus, selon l’Association canadienne pour la santé mentale: :
« 43 % des Canadiens indiquent qu’au moins un de leurs collègues a déjà vécu un problème de santé mentale alors que 34 % indiquent qu’un des leurs a été en arrêt de travail pour cette raison. Dans 74 % de ces cas, les collègues ne sont jamais revenus au boulot. »
Source : Journal Le Reflet du vendredi 9 octobre p. 8
Des statistiques très troublantes, qui, à vue d’œil, me semblent, par contre, très élevées. Malheureusement, ces organismes ne précisent pas d’où proviennent ces données. Évidemment, tout dépend de la définition que l’on donne aux termes «absentéisme» et « maladie mentale ». En outre, comme nous le verrons plus loin, les règles de confidentialité cachent un nombre important de cas qui ne seront jamais déclarés aux collègues.
Mais bon, au-delà des chiffres, un fait demeure, la maladie mentale est beaucoup plus répandue que l’on pourrait le croire a priori. Peu de gens en parlent, les victimes se marginalisent, c’est un sujet tabou, honteux. En conséquence, on en entend très peu parler jusqu’à se demander si ça existe vraiment.
Les statistiques avancées par le FFAPAMM nous ramènent les deux pieds sur terre.
Par contre, quel rôle doit jouer l’entreprise et par extension ses employés et gestionnaires dans la prévention des maladies mentales et le support aux gens qui en sont atteints?
En ce qui a trait à la prévention, je crois que les entreprises ont un énorme rôle à jouer. D’ailleurs, nous pouvons facilement voir la situation sous un angle beaucoup plus large en englobant la santé de façon générale. Plusieurs entreprises possèdent des programmes santé qui comprennent des volets très larges proposant des actions concrètes sur des éléments tels que : le climat de travail, la santé physique, un programme d’aide, des conférences, sur la nutrition, l'équilibre travail/famille, etc.
La liste est très longue dans certains cas et c’est tant mieux! En espérant que d’autres entreprises s’inspirent de ces programmes, car ils permettent de favoriser la mobilisation, la rétention et la performance organisationnelle tout en diminuant l’absentéisme. Ce sont des programmes gagnants pour l’entreprise ET pour les employés.
Mais qu’en est-il lorsque la maladie mentale frappe un employé? Les gestionnaires et les collègues de travail ont-ils un rôle à jouer dans ce cas?
Toujours selon le FFAPAMM :
« … il est primordial que les membres de l’entourage et les collègues de travail puissent avoir accès à l’information, à la formation et à différentes mesures de soutien leur permettant de jouer pleinement leur rôle d’accompagnateur. »
Donc, selon le FFAPAMM, les employés et gestionnaires devraient jouer un rôle d’accompagnateur…
Est-ce vraiment leur rôle?
Je comprends fort bien le FFAPAMM de faire le maximum pour impliquer les entreprises, mais….
… encore faut-il que l’employé malade veuille bien divulguer et discuter de sa condition avec son employeur et ses collègues, car, sinon, l’employeur doit, tout d’abord, avoir le plus grand respect envers les règles les plus élémentaires de confidentialité.
En tant que gestionnaire, il m’est impossible de partager avec mon équipe une information confirmant le diagnostic d’un employé sans le consentement de ce dernier, qu’il s’agisse de santé mentale ou autres. C’est aussi une question de respect.
Au surplus, il arrive même que l’employé ne discute pas du diagnostic avec l’employeur laissant l’information précise à l’assureur. Dans ce cas, les règles de confidentialité imposent à l’assureur le silence, et ce, même auprès de l’employeur.
Difficile pour l’entreprise de jouer un rôle support dans de tels cas. Entre la volonté et la capacité réelle de l’entreprise, il y quelques fois un écart important.
Mais même dans le cas où l’employé divulguerait volontairement le diagnostic à son employeur et ses collègues, dans quelles mesures peuvent-ils réellement aider.
Selon le FFAPAMM, nous pourrions faire beaucoup, non pas en nous substituant au thérapeute, mais en étant présent, réconfortant et supportant.
C’est l’invitation qui nous est lancée.
Qu’en pensez-vous?
Image: shattered.art66
5 commentaires:
Selon moi, le rôle à jouer auprès des personnes souffrant d'une maladie mentale n'est pas une question d'obligation au niveau de l'entreprise mais bien une responsabilité en tant qu'être humain. Donc, que ce soit en entreprise ou ailleurs, donner son support ou son écoute à une personne qui souffre relève de ses propres valeurs. Un peu comme on choisi d'ouvrir ou non la porte à une personne en béquille.
Le problème avec la maladie mentale est que le sujet est tellement tabou qu'une personne qui en souffre doit non seulement essayer de gérer son problème mais aussi faire face aux préjugés. Et comme la personne est déjà vulnérable émotivement, ces préjugés peuvent venir aggraver la situation. Parfois, une simple écoute peut aider à désamorcer une angoisse momentanée. Ce qui peut permettre à la personne de continuer jusqu'à son prochain rendez-vous officiel.
Je pense donc qu'il faut répondre à l'invitation du FFAPAMM et être "présent, réconfortant et supportant." Mais pas parce que l'on y est obligé. Plutôt parce qu'un ou une de nos collègues en a besoin.
@Pascale Soucy:
Bonjour Pascale, très heureux que tu viennes commenter ici.
«Selon moi, le rôle à jouer auprès des personnes souffrant d'une maladie mentale n'est pas une question d'obligation au niveau de l'entreprise mais bien une responsabilité en tant qu'être humain.»
D'accord avec toi sur l'aspect humain de la question.
Je suis aussi d'accord avec le fait qu'il importe de répondre présent à l'invitation du FFAPAMM.
Par contre, ce que j'aimerais particulière savoir c'est comment y arriver malgré certaines contraintes légales et aussi humaines justement du fait de certains préjugés ainsi que des éléments que je souligne à la fin du billet.
Exprimé autrement: Comment concilier respect, loi, confidentialité, humanisme, gestion, affaires, climat de travail et autres?
Une problématique pas si simple lorsque l'on s'y attarde.
La première fois que j'ai vu ton tweet, j'ai laissé passé. Puis ton rappel m'a amené sur ton site. Il faut dire que ce n'est pas mon sujet de prédilection.
J'ai surtout aimé la réponse de Pascale:"...n'est pas une question d'obligation au niveau de l'entreprise mais bien une responsabilité en tant qu'être humain. " Je suis bien d'accord.
Par contre, j'aimerais rajouter quelque chose au niveau du gestionnaire. Un gestionnaire se doit d'obtenir une performance de ses équipes et individus. Dans ce sens, le côté humain prend un peu le bord, mais ce que je veux dire, c'est que si la performance individuelle n'est plus la même, ça peut donner un indice. Pour ça, le gestionnaire doit pouvoir mesurer cette performance et être à l'affût des signes, ce qui est différent.
Mais plus que les habiletés individuelles, la performance est aussi le résultat d'un contexte social. Donc, encore là, si la maladie mentale affecte un individu, cela va transparaître sur la performance globale.
Je dirais donc qu'il faut:
- mieux outiller (formation) les gestionnaires pour être en mesure de mieux gérer le côté humain.
- faire connaître les programmes qui existent
- sensibiliser les personnes à parler
Plus que ça, le gestionnaire se doit de mettre une limite je crois. Ça se tient comme commentaire ?
@ Le Gestionnaire Borg
Tu as un très bon point, c'est une situation complexe! Tu poses les bonnes questions quand tu dis "Comment concilier respect, loi, confidentialité, humanisme, gestion, affaires, climat de travail et autres?" Car une personne atteinte d'une maladie mentale aura un impact direct sur son entourage et sur sa performance au travail comme l'indique Mathieu dans son commentaire.
Je suis aussi d'accord avec Mathieu et ce qu'il propose :
"- mieux outiller (formation) les gestionnaires pour être en mesure de mieux gérer le côté humain
- faire connaître les programmes qui existent
- sensibiliser les personnes à parler."
Par contre, je demeure réaliste. Le rôle que se donne un employeur dépend de ses propres valeurs et de ses préjugés. Je ne suis pas non plus certaine qu'il y ait de recette qui s'applique à tous. Je pense donc qu'il faut évaluer chaque cas de façon individuelle selon la personne, le type d'emploi, la maladie, sa durée, ses impacts, etc.
Non, de toute façon, ce n'est pas simple pour personne...
@Mathieu Laferrière:
Je suis heureux que tu abordes l'angle «gestionnaire» afin de dégager les enjeux et les défis de gestion que suppose les problèmes de santé mentales.
Je retiens qu'il importe de demeurer humain et près des membres de nos équipes afin de détecter les signes.
De plus, l'organisation a aussi des responsabilités, dont celles d'outiller adéquatement les gestionnaires.
Ton commentaire se tient, bien évidemment!
En outre, tu effleures un élément très important lorsque tu mentionnes que le gestionnaire doit aussi se mettre une limite. Tu traces la ligne à un endroit précis et je suis très à l'aise avec ta position mais y-a-t-il consensus sur la question?
@Pascale Soucy:
Tu mentionnes qu'il importe de s'adapter à chacun des cas. Appliquer la théorie de la contingence dans le domaine de la gestion des ressources humains demeure une valeur sûr.
J'aime bien aussi le lien que tu fais entre les actions à poser, les valeurs et la culture d'entreprise. Effectivement, la façon dont le gestionnaire abordera ces questions doit être fortement imprégnée des valeurs de l'organisation.
Merci pour vos commentaires, très intéressant!
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