Un gouvernement doit-il intervenir lorsqu'une entreprise se départit d'une technologie prometteuse alors que ladite technologie fut financée par les contribuables via des subventions ou des avantages fiscaux?
C'est l'épineuse et intéressante question qui est admirablement bien illustrée par le cas du rachat par Ericsson des activités de Nortel Networks dans le secteur du sans-fil.
Les détails de l'histoire se retrouvent sous ce lien. En résumé, suite à un processus d'appel d'offres, ces actifs de Nortel furent achetés par Ericsson pour la coquette somme de 1,13M$ USD.
Ericsson allègue que cette transaction respecte intégralement les règles en la matière et rien ne laisse présumer le contraire. Cette transaction semble tout à fait propre et légale.
Bien sûr, dans toute transaction il y des gagnants et des perdants. Ericsson est présentement facilement identifiable du coté des gagnants. Du coté des perdants figure Research In Motion (RIM), le légendaire fabricant du BlackBerry, qui aurait bien aimé mettre aussi la main sur ces intéressants actifs.
RIM fut écarté du processus d'appel d'offres. Si vous lisez attentivement la citation ci-bas, vous remarquerez qu'il semble que se soit le gouvernement fédéral qui fasse pression afin que RIM s'implique....ou peut-être est-ce l'inverse??!! L'oeuf ou la poule? À vous de choisir. Bref, ce qui est clair c'est que, dans ce dossier, les intérêts de RIM et ceux du gouvernement, incluant celui de l'Ontario, convergent.
«RIM a été mise à l'écart lorsqu'elle s'est objectée au processus d'appel d'offres de Nortel. Elle a cependant promis de continuer à se battre pour mettre la main sur certains actifs de l'entreprise et pressé le gouvernement fédéral à «s'impliquer afin de protéger des intérêts canadiens capitaux». Le gouvernement de l'Ontario a joint sa voix à celle de RIM, lundi, et affirmé que le fédéral devrait bloquer l'entente, qui permettra que de la technologie canadienne clé passe entre les mains d'intérêts étrangers.»
Source: Cyberpresse
Quel est donc le principal argument du gouvernement et de RIM afin de conserver ces actifs sous contrôle canadien? Tout simplement:
«...que ces actifs de Nortel ne devraient pas être vendus à une compagnie étrangère puisque les contribuables canadiens ont aidé au financement du développement de la technologie de prochaine génération développée par Nortel.»
Source: Cyberpresse
Au delà des jeux politiques, voilà bien le principal débat. Un gouvernement qui finance le développement de technologies au sein d'entreprises privées cotées à la bourse de surcroît, peut-il ou doit-il, avoir un droit de regard sur le transfert de propriété de ces actifs?
Mais tout d'abord, une petite parenthèse. Si le gouvernement canadien investissait plus en recherche et développement au lieu de sabrer continuellement dans ces budgets, nous serions peut-être un peu moins vulnérable dans le développement de technologies.
Ceci étant dit....
Je crois que le gouvernement a tout simplement manqué de vision dans ce dossier. Je m'explique. Ma conception du développement de technologies par une entreprise capitaliste canadienne est à l'effet que la propriété de telles technologies appartient à l'entreprise. Ces entreprises étant cotées en bourse, il est clair qu'il existe un risque de transfert de propriété. Ce risque est inhérent à la nature de la bête capitaliste. Je n'aime pas l'idée que l'État puisse s'approprier ces technologies sous le grand principe creux des «intérêts supérieurs canadiens». Adhérer à ce principe ouvrirait toute grande la porte des abus potentiels.
Par contre, lorsqu'une entreprise telle que Nortel approche le gouvernement pour qu'il lui vienne en aide, ce n'est pas seulement l'État en tant qu'État qui est interpellé, mais aussi et surtout, l'État en tant que créancier. À ce titre, rien de l'empêche de fixer les conditions de crédit qu'il juge importantes.
C'est à ce moment que le manque de vision du gouvernement entre en scène. Si les actifs que nous avons financés via nos impôts étaient si essentiels, pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas prévu un mécanisme assurant le transfert à des intérêts canadiens? Le débat actuel laisse croire que rien n'a été fait en ce sens. Bloquer la transaction à la toute fin, sous le libre-arbitre du gouvernement, crée un climat économique trop incertain puisque soumis à des règles trop floues.
C'est au moment de négocier le financement que ces questions se posent et non pas lorsque la transaction de vente est annoncée.
En terminant petite question sans réponse, fort probablement:
Après combien d'années en opérations au Canada la dette de Nortel envers les contribuables est-elle ou aurait-elle été éteinte?
N'essayez pas de répondre, ça non plus ça n'a pas été prévu....
3 commentaires:
Très intéressant comme information
Je trouve que les bulletins de nouvelles donnent très peu d'information pour nous permettre de comprendre les tenants et les aboutissants.
On mentionne très peu le sort de RIM dans tout ça. Et lorsqu'on en parle, on ne peut saisir pourquoi RIM a été écartée et pourquoi elle l'a été.
On a dit aussi que Toronto craignait qu'Ericsson transferts tous les emplois à son entreprises de Montréal.
Donc, est-ce que le Québec a avantage à ce que l'offre d'Ericsson soit rejetée?
J'aurais dû écrire:
On mentionne très peu le sort de RIM dans tout ça. Et lorsqu'on en parle, on ne peut saisir pourquoi RIM a été écartée et aurait-on dû éviter qu'elle le soit?
@Jackss:
Se sont de bons points et de bonnes réflexions. Il est clair que dans ce type de dossier il importe d'aller au-delà des informations qui nous sont transmises et de voir qui sont les acteurs de la nouvelle et les intérêts en jeu.
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